SNALC

Lettre d'information du Snalc Versailles Premier degré

Professeur des écoles - Relever le niveau des élèves

 

Nous ne pouvons que partager le constat de Monsieur le Ministre : la difficulté scolaire demeure persistante.
C’est une réalité palpable à laquelle les enseignants sont confrontés quotidiennement tant dans le premier que dans le second degré et qu’ils dénoncent depuis plusieurs années. En revanche, nous ne partageons pas l’analyse ni les stratégies engagées sans aucune concertation avec ces professionnels de l’enseignement que sont les enseignants du premier et du second degré.
Les chiffres soulignent qu’à l’entrée en sixième :

  • Plus d’un élève sur cinq a une maîtrise insuffisante des fondamentaux en français,
  • Un sur trois en mathématiques
  • Un élève sur deux ne sait pas lire avec aisance
L’orthographe serait « devenue préoccupante ».
Pourtant le démantèlement des dispositifs de Réseaux d'Aides Spécialisées aux Élèves en Difficulté (RASED) depuis 2008 présageait ces conséquences qui avaient été anticipées et dénoncées par les professeurs des écoles et leurs collègues des collèges.
Nous proposons plusieurs pistes d’analyse qui montrent que ce n’est pas la multiplication des évaluations nationales qui aura un impact positif : elles ne feront que corroborer le niveau inquiétant des élèves.

 

De la suppression des RASED :

L’école primaire disposait d’enseignants spécialisés en nombre formés qui accompagnaient les élèves du cycle 1 au cycle 3. Or il est constaté de façon unanime que la « disparition » des RASED est une des causes qui ont entraîné le décrochage scolaire en sixième.
En effet, tant pour l’aide à dominante pédagogique que relationnelle, la première réponse en termes de remédiation pédagogique se trouve du côté de la motivation.
L’aide à dominante relationnelle agissait en prévention dès la moyenne section. Cette prévention a disparu progressivement alors qu’elle avait un effet bénéfique sur l’acquisition des fondamentaux (langage oral et écrit en particulier).
En outre, « l’accroche scolaire » dès la moyenne section est plus rapide (moyenne de trois mois permettant de multiplier les petits groupes au sein d’une cohorte). Cette moyenne s’allonge au fur et à mesure de la montée des élèves dans les classes d’un niveau supérieur et avec l’âge à plus d’un an voire plus.
Des facteurs tels que la préadolescence, le déficit d’estime de soi lié au vécu de situations d’échec répétées, le sentiment de non-appartenance au groupe en raison du non-partage de réussite sont à l’origine de l’échec scolaire.
La prévention doit intervenir en amont du cycle 3 car elle est un levier de la réussite scolaire. L’aide relationnelle et l’aide pédagogique sont indissociables et permettent d’assurer une estime de soi nécessaire aux apprentissages.
Or les suppressions massives de postes d’enseignants spécialisés en RASED ne permettent plus la poursuite des aides au cycle 3 dans la majorité des circonscriptions voire même au cycle 2.
Par conséquent, l’absence de prévention en moyenne section et de remédiation à partir du CE2 favorise le décrochage scolaire en sixième.
Ce ne sont pas des évaluations massives qui permettront d’aider ces élèves mais la réinstauration des RASED et la formation de nouveaux personnels en nombre suffisant à l’aide spécialisée.

L’impact de la crise sanitaire :

Il a été décidé par décret que les enseignants des RASED deviendraient personnels remplaçants au sortir du confinement.
La crise a creusé les inégalités et eu des conséquences pour les élèves les plus fragiles qui ne disposaient pas forcément d’outils numériques permettant la classe à distance.
Les enseignants des RASED sont venus en renfort de leurs collègues afin de joindre les familles par téléphone, d’aider les élèves via un smartphone partagé entre plusieurs enfants de la fratrie, de déposer dans la boîte aux lettres des photocopies imprimées à l’école.
Des décisions prises localement, communiquées par de simples appels ou des courriels injonctifs d’IEN, ont alors sacrifié l’aide spécialisée pour compenser les remplacements qui étaient déjà problématiques avant la crise. Ces décisions ont accru la non-égalité des chances surtout pour les élèves de cycle 2 en apprentissage de la lecture.

Autres dispositifs et limites :

D’autres dispositifs tels que les stages de réussite au CM1/CM2 et étendus aux autres classes lors des « déconfinements » ainsi que les APC existent.
Ces activités pédagogiques complémentaires (APC) font partie des obligations de service des professeurs qui les organisent et les mettent en œuvre dans toutes les écoles. Mais, elles ne relèvent pas du temps d’enseignement obligatoire pour les élèves. Elles s’ajoutent aux 24 heures hebdomadaires d’enseignement dues à tous et nécessitent l’accord des parents concernés. Ces derniers peuvent donc la refuser pour diverses raisons (disponibilité personnelle pour accompagner l’enfant ou refus non motivé).
Pourtant les chiffres parlent d’eux même. La réalité est que lorsque la difficulté devient persistante, ils ne peuvent y répondre. En effet, la remédiation pédagogique est un moyen efficace nécessitant une formation et des personnels spécialisés.

Conclusion :

Les enseignants ont des « repères pédagogiques » mais ce sont les moyens qui manquent à l’école primaire en particulier. Les professeurs du second degré gèrent depuis longtemps l’hétérogénéité des niveaux en classe de collège mais aussi en SEGPA ou en ULIS où ils interviennent en complément des collègues affectés dans ces dispositifs, majoritairement professeurs des écoles.

Anita SENHADJI, SNALC Versailles premier degré