SNALC

Hors classe agrégés 2018

Compte rendu CAPA : l'indispensable rôle des commissions paritaires

Le groupe de travail et la CAPA hors-classe agrégés qui viennent de se dérouler ont présenté un caractère totalement inédit, et qui devrait rester unique. L'année 2018 est en effet une année charnière.

Pour la première fois, le PPCR commence à s'appliquer : le barème d'accès à la hors-classe est constitué de la somme de points d'ancienneté dans la plage d'appel et de points dus à l'appréciation du recteur, dont la caractéristique essentielle, on l'a assez répété, est que cet avis est donné une fois pour toutes et restera inchangé les prochaines années. Avis EXCELLENT un jour, EXCELLENT toujours, mais aussi...« A CONSOLIDER » un jour, « A CONSOLIDER » pour toujours ! Est-il alors possible de consolider encore?

 

En régime de croisière, cet avis du recteur s'appuiera sur le double rendez-vous de carrière, inspecteur et chef d'établissement. Mais pour cette année, point de rendez-vous de carrière, les avis de l'inspection pouvaient donc s'inspirer parfois de visites anciennes. De plus, ces avis n'étaient pas motivés, pas plus que ceux du chef d'établissement! Les avis devaient être visibles sur I-prof avant les commissions, mais très souvent ce ne fut pas le cas. En cas d'erreur de l'administration, les collègues n'avaient aucun moyen de s'en apercevoir pour correction avant commission...

 Le pire était toutefois à venir.

 Des instructions avaient été données par le ministère aux rectorats pour s'adapter aux nouvelles modalités d'accès à la hors-classe. Il fallait distribuer 10% d'avis EXCELLENTs, 45 % d'avis TRES SATISFAISANTs au maximum, le reste en avis SATISFAISANT et pour certains « A CONSOLIDER », sans quota. Précisons que les 10% d'avis maximum sont calculés sur la base du total de candidats promouvables, comme l'an dernier. Cependant, le vivier des collègues promouvables commence au neuvième échelon avec deux ans d 'ancienneté, et non à partir du début du septième échelon comme auparavant. De ce fait, mécaniquement, le nombre total autorisé d'avis maximum du recteur a été réduit de plus de moitié : de nombreux collègues ayant obtenu un avis exceptionnel l'an dernier ne pouvaient donc pas retrouver un avis EXCELLENT cette année ( les dénominations ont été modifiées pour éviter les comparaisons ). De plus, les avis devaient être répartis équitablement entre les échelons 9, 10 et 11. Pour chacun d'entre eux, 10% d'avis EXCELLENT, et au maximum 45% d'avis TRES SATISFAISANT. Appliquant les instructions ministérielles, l'administration a fait parvenir aux organisations syndicales, avant le groupe de travail, des documents où elle attribuait 10% d'avis EXCELLENT au 9ème échelon, 10% au 10ème et 10% au 11ème. Les avis TRES SATISFAISANT, eux, étaient loin des 45%.

Mais comment a-t-elle procédé pour répartir ces avis ? Les avis de l'inspection étaient souvent les mêmes que l'an dernier. Or il n'était pas possible de donner cette année un avis EXCELLENT à tous les collègues ayant obtenu un avis exceptionnel l'an dernier, quotas obligeant. Quant aux chefs d'établissement, une analyse statistique montre qu'ils ont très souvent privilégié l'ancienneté des collègues. Cela a également été le choix de l'administration. Au sein des échelons 10 et 11, parmi tous les enseignants ayant obtenu un double avis très favorable de l'inspection et du chef d'établissement ( ou un avis très favorable pour les collègues du supérieur ), seuls les plus anciens dans l'échelon se voyaient gratifiés d'un avis EXCELLENT du recteur ! Ainsi, alors que 16,4 % des agrégés à l'échelon 11 avec un an d'ancienneté obtenaient un avis EXCELLENT du recteur, la proportion de ceux étant passé au 11ème échelon cette année était de... 0 % !!! Idem pour l'échelon 10 : 23,4 % des agrégés ayant trois ans d'ancienneté dans l'échelon obtenaient l'avis EXCELLENT, mais 1 % seulement avec un an d'ancienneté et 0 % pour les échelons 10 de l'année !

Privilégier l'ancienneté dans l'échelon était certes la pratique des années antérieures. Mais dans l'ancien système, les avis étaient renouvelés chaque année, et chacun voyait théoriquement son appréciation s'améliorer d'année en année. Désormais, ces avis sont donnés une fois pour toutes! Comment justifier, dès lors, que les collègues tout juste passés à l'échelon 10 ou 11 cette année soient jugés définitivement de moins bons enseignants que ceux promus il y a deux ou trois ans? Comment justifier que les collègues passés cette année au 11ème soient extrêmement pénalisés par rapport aux collègues en fin d'échelon 10 qui ne sont pas encore passés au 11ème et bénéficient d'un avis EXCELLENT?

On ne le peut pas, évidemment. Des distorsions presque aussi grandes ont été également observées dans les distributions respectives d'avis TRES SATISFAISANT et SATISFAISANT. Dès la tenue du groupe de travail du vendredi 4 mai, le SNALC a souligné le caractère inacceptable de la répartition de ces avis, et demandé que les quotas de 10 et 45 % soient appliqués non seulement pour chaque échelon, mais également au sein de chaque cohorte par échelon : 10ème échelon de l'année, 10ème échelon avec un an d'ancienneté, avec deux ans d'ancienneté, etc., seule façon de se montrer juste envers tous les collègues. Au moins sur ce point, toutes les organisations syndicales siégeant étaient du même avis.

Sans se prononcer sur la suite qu'elle donnerait à notre requête, l'administration a alors invité les représentants du personnel à formuler des propositions d'améliorations d'avis. Ce qui a été fait en séance. Le SNALC, tout particulièrement, a avancé des propositions extrêmement nombreuses d'améliorations d'avis SATISFAISANT en TRES SATISFAISANT, ou TRES SATISFAISANT en EXCELLENT, dans le but de rééquilibrer les quotas au sein de chaque cohorte.

 Puis vint la CAPA du vendredi 25 mai.

Dans les nouveaux documents fournis l'avant-veille au soir et que nous avons dû consulter dans l'urgence, il est apparu que les propositions syndicales avaient été prises en compte pour les avis TRES SATISFAISANT, arbitrage de l'inspection aidant. En revanche, aucune modification pour les avis EXCELLENT !

Il a fallu toute la force de conviction et de persuasion des commissaires paritaires du SNALC, rejoints en cela par les autres commissaires, pour exiger dès le début des travaux, une modification profonde sur ce dernier point.

 L'administration nous a objecté que, de toute façon, tous les collègues finiraient par passer un jour à la hors-classe. Rappelons qu'en effet le barème du PPCR privilégie l'ancienneté dans la plage d'appel pour y accéder. Néanmoins, un avis TRES SATISFAISANT fait gagner deux ans par rapport à un avis SATISFAISANT, un avis EXCELLENT encore deux ans par rapport à un avis TRES SATISFAISANT, tandis qu'un avis A CONSOLIDER fait perdre un an par rapport à un avis SATISFAISANT, quand il n'y a pas d'opposition du recteur. Cinq ans d'écart dans le passage à la hors-classe, ce n'est pas rien et cela vaut la peine d'y regarder de près !

Nos commissaires tenant bon, l'administration, après la pause du déjeuner a fini par se ranger à nos arguments.

Il a fallu un après-midi entier de travail intense pour procéder au nécessaire rééquilibrage que les élus du SNALC demandaient pourtant dès le 4 mai. Au sein de chaque cohorte, comprise comme l'ancienneté en années dans un échelon, furent attribués les quotas d'avis EXCELLENT et TRES SATISFAISANT.

Restait encore la question épineuse du choix : sur quels critères allait-on distinguer les collègues les plus méritants ? Un autre syndicat privilégiait l'âge, la position du SNALC a été de s'appuyer d'abord sur le double avis des chefs d'établissement et de l'inspection. Sur ce point nous avons eu gain de cause, à l'échelon 10 notamment, car à l'échelon 11 quasiment tous les collègues évoqués étaient dans ce cas. A également été pris en compte l'avis rectoral de l'an dernier : un avis exceptionnel décerné l'an dernier pouvant alors parfois être déterminant.

Mais ensuite, sur quel autre critère secondaire s'appuyer ? Le SNALC a dénoncé l'absence d'avis littéral d'inspecteur ou de chef d'établissement. Les notes n'ont pas non plus été « vieillies », procédé technique permettant de prendre en compte l'ancienneté de la dite note. En effet, un collègue inspecté il y a dix ou même cinq ans, a été noté dans une plage définie par son échelon d'alors, en revanche, un collègue inspecté récemment est noté dans la plage de son dernier échelon, une inspection récente étant alors à l'avantage des collègues.La date de naissance fut finalement et en ultime ressort le dernier critère pris en compte. 

Tous les dossiers ayant reçu une opposition du recteur ont été systématiquement évoqués.

Quelques oppositions du recteur ont pu être levées. Rappelons qu'une opposition du recteur n'est pas pérenne, contrairement à son avis, et ne vaut que pour l'année en cours.

Comme nous avons pu le constater avec satisfaction en fin de journée, le SNALC a obtenu un nombre considérable de modifications.

Ci-dessous un tableau des avis après CAPA :

Dans la colonne échelons, 10 points sont attribués par ancienneté dans la plage d'appel. Après trois ans d'ancienneté dans le onzième échelon, on passe directement de 80 à 100 points. À ces points d'ancienneté s'ajoutent ceux du recteur : un avis TRES SATISFAISANT donne 20 points de plus qu'un avis SATISFAISANT, et fait donc gagner deux ans, un avis EXCELLENT fait gagner encore 20 points, donc deux ans supplémentaires, tandis qu'un avis A CONSOLIDER fait perdre 10 points, donc un an, quand il n'y a pas opposition du recteur.

 En dépit des retards d'information et du temps contraint dans l'ensemble, les grands équilibres que les élus du SNALC demandaient ont été respectés : les pourcentages d'avis sont quasiment identiques, 10% et 45%, quelle que soit l'ancienneté dans l'échelon. Une très grande partie des collègues dont l'appréciation a été améliorée se révèle finalement être ceux que le SNALC avait signalés dès le groupe de travail.

La liste des proposés de l'académie établie sur la base du barème n'a été définitive que la semaine suivant la commission paritaire,, le temps que le logiciel du rectorat soit relancé pour enregistrer tous les changements.

Le SNALC qui été le seul syndicat à voter contre la réforme du PPCR. a regretté l'impréparation de l'administration aux conséquences profondes et multiples de la dite réforme. À la décharge des agents du rectorat, ces derniers connaissent, une charge croissante de travail.

Actons néanmoins que, dès lors que des représentants syndicaux compétents, responsables et surtout déterminés défendent les collègues, le dialogue social dans le rectorat de Versailles est encore possible, et peut être fructueux au moins pour limiter les dégâts d'une réforme mal pensée et mal préparée.

Or c'est précisément le moment que choisit le ministre de la fonction publique, M. Darmanin, pour envisager la suppression des commissions paritaires ! Dans cette hypothèse, qui, demain, défendra les collègues en commission ? Qui pourra repérer les erreurs, corriger les absurdités, s'élever contre l'arbitraire ? Et qu'en pense le Ministre de l'Éducation Nationale, Jean -Michel Blanquer, réputé fin  connaisseur du système ?

Si la CAPA hors-classe agrégés, avec toutes ses imperfections, a démontré une chose, c'est bien l'indispensable rôle des commissaires paritaires.

Lionel MABILLE

Commissaire Paritaire académique